Le 7 mars - Bangalore - Tamil Nadu

« La connaissance parle, la sagesse écoute » - Jimi HENDRIX

Aujourd'hui, Laura quitte la Caravane.

Krishnamurti Valley School

Nous sommes tous attendus pour la journée à Krishnamurti Valley School.

Salle à manger où nous avons été accueillis pour le petit déjeuner, le déjeuner et le goûterDès notre arrivée, un copieux petit déjeuner indien nous est offert. La salle de restauration est simple et propre, intégrée dans la nature, une grande sérénité s'en dégage malgré la fréquentation. Préalablement déchaussés, nous sommes assis en tailleur autour de tables basses de marbre lisse qui participent au décor épuré.


Concert des enfants pour commencer la journéeDanse traditionnelle des écolières en concert de bienvenue


Le directeur, Dr Satish Inamdar invite à nous asseoir dans une salle de spectacle ouverte, la charpente traditionnelle de bois lié de cordes et le toit de palme sont magnifiques. La fête quotidienne qui introduit la journée débute. Des groupes d'élèves adolescents se succèdent pour offrir le meilleur de leurs créations du moment : chorale, musiciens percussionnistes, danseuses... C'est aussi le moment choisi pour fêter les anniversaires, c'est le cas aujourd'hui pour l'un d'entre eux.

Puis le directeur nous présente la philosophie du lieu. En voici quelques points : « Qu’est-ce qui a changé dans les 50 000 années de civilisation ? L’Humain s’est de plus en plus divisé : en tribus, en clans. Il s'est divisé en religions organisées, il s'est parfois même divisé à l’intérieur des religions elles-mêmes ; il s'est divisé aussi en nations. Nous sommes actuellement au maximum des divisions : 80 à 90 % des guerres sont dues aux religions et aux conflits entre nations. Aujourd'hui nous avons trouvé une autre raison de nous diviser : l’économie. Et c’est encore une bonne excuse pour continuer de se diviser.

Krishnamurti voyait les religions comme des structures caduques...

Si nous voulons un autre monde, il est nécessaire de penser au-delà des divisions, de penser une éducation différente.

Comment pouvons-nous faire autrement ? Comment faire si nous ne savons pas comment fonctionne l'humain, la psyché humaine ?

Pour lui, il est important de créer une école. Une école qui soit pour les enfants, les parents, les enseignants et le personnel.

Pouvons-nous élever des enfants sans peur, sans « pollution » ? C’est un grand défi pour l’éducation de nos enfants. C’est en élevant les enfants sans préjugés qu' il y a réellement un espoir....

Nous ne nions pas la diversité du monde, langage, couleur, écriture, etc…

Le désir du cœur est de rencontrer les autres, d'autres peuples. Est-ce du tourisme ou un apprentissage pour grandir en tant qu'être humain ? La crise actuelle dans le monde montre que la quête matérielle est infructueuse. Le monde semble s’être unifié à travers la technologie mais est-ce vraiment un seul cœur ? Dans le capitalisme, la division se fait. Maintenant la récession entraîne le chômage, les jeunes n'ont plus de travail. Il y a de plus en plus de pauvres, plus de haine pour l'autre.. Les dépenses pour l’armement sont énormes... C’est un défi pour tous de savoir ce que nous voulons. Est ce que nous pouvons faire grandir nos enfants au delà de cela ? Cette école est là comme réponse, elle est là pour rendre les enfants heureux, ce sont les adultes de demain.

Marc se reconnaît dans ce discours et pose une question: « comment ressentez-vous notre venue, quel est votre sentiment par rapport à la Caravane Amoureuse ? ».

« Nous avons l’esprit ouvert et nous sommes heureux d’accueillir des personnes qui ont l’esprit ouvert et qui viennent nous rencontrer dans cet esprit. La musique est un très bon médiateur pour se rencontrer ».

Après ces échanges, commence la visite du lieu. Il nous est proposé de faire deux groupes d'activités différentes qui alterneront par la suite :

  • les uns pourront visionner un film sur Krishnamurti suivi d'un échange avec des professeurs de l'école, puis suivra la visite du parc pour découvrir l’aspect Nature.
  • l’autre commencera par la visite du « village artistique » de l'école : musique, théâtre, danse, peinture, poterie, céramique, suivie d’une interaction musicale.

Le premier groupe se dirige vers la salle de projection pour visionner une des six conférences de Krisnamurti donnée en 1982 que l’on peut retrouver sur le site jkrisnamurti.org.

Nous apprenons ensuite que ce centre a été créé en 1975 et l’école en 1978. Il y en a cinq autres en Inde. Le centre accueille 350 enfants de 6 à 18 ans. Il est international. Il y a seulement quatre à six élèves non indiens.

L'école est mixte. Les demandes d'admission sont nombreuses (200 pour 80 places) ; l’attitude des parents est un critère de sélection , elle doit être compatible avec les choix de l’école pour qu'il y ait cohérence d'éducation et que ce soit harmonieux pour l'enfant. Le coût de la scolarité est de l'ordre de 20 à 25000 roupies soit 3500 euros par an mais le centre est ouvert à tous les milieux sociaux. En effet, le gouvernement fixe un quota de 25% d’élèves de milieu moins aisé et un système de bourse est mis en place.

Les enfants sont accueillis dès l’âge de 6 ans en classe de 16 à 17 enfants avec le même professeur pendant trois ans. Les principales caractéristiques de l'enseignement dispensé sont : aucune compétition ni de schéma récompense-punition. Les enfants apprennent par eux-mêmes et l’apprentissage se fait par le dialogue et les discussions. Le professeur est un facilitateur, il encourage ses élèves à développer leur propre talent par une recherche personnelle. Chacun va à son rythme selon son propre épanouissement. Ici il n'y a pas de professeurs de métier mais des professionnels de divers horizons (ingénieurs, médecins, musiciens,...) et si leur philosophie correspond à celle de cette école, ils peuvent venir enseigner ici. L'importance est donné à l'Amour et au Respect. Ils aiment les enfants et sont intéressés par une démarche : celle d' « ouvrir son propre livre intérieur » que ce soit pour les enfants comme pour eux-mêmes.

C'est pourquoi, aucune suprématie n'est donnée entre les matières enseignées. Les enfants bénéficient ici d'autant d'heures de math que de musique, d'art et autres... Sont dispensées les matières académiques et beaucoup d’autres dont le soin à la terre. Quatre langues sont enseignées : anglais, indi, sanscrit, kanada. Il n'y a pas d’examen du premier niveau au huitième ; aux niveaux dix et onze (équivalant de la troisième de notre collège en France), il y a les examens nationaux à passer. Après le niveau douze, ce qui correspond à la fin du lycée en France, les élèves prennent souvent une année sabbatique pour chercher leur voie, leur projet personnel. Beaucoup s’orientent vers l’université.

Toutes le écoles Krishnamurti sont tripartites : il y a la zone école, une artistique et un centre d’études pour les travaux d’approfondissement, sur la pédagogie, sur Krisnamurti et aussi pour les personnes qui viennent en retraite.

Pour nous, regard extérieur, ce qui nous saute immédiatement aux yeux comme résultat de cette démarche pédagogique : ce sont des étudiants qui n’ont pas peur de parler à des adultes, ni en public.

Marc en communion avec le splendide banianLa visite du parc commence, il est splendide. Nous sommes maintenant dans un nid de verdure ; 100 acres désertiques ont été reboisées. A chaque rentrée scolaire, depuis la création du lieu, chacun des élèves plante symboliquement un arbre. Ici tout le monde respecte la nature et s'exerce à vivre en harmonie avec elle. Pour Krishnamurti, la Nature nous enseigne. Il est nécessaire de laisser la Nature telle qu’elle est, c'est pourquoi il existe très peu de bâtiments et de nombreux cours sont faits en plein air. Il y a deux lacs qui servent aussi de retenues d'eau lors des moussons. L'école jouxte une forêt, aucune limite entre les deux. Dans cette espace laissé sauvage, se trouvent des éléphants, des cerfs, des lapins, des ours, des panthères et aussi beaucoup beaucoup de serpents. Actuellement plus de 350 espèces d’oiseaux sont dénombrées. L’arbre à fleurs jaunes magnifiques qui subjugue nos regards se nomme ici « Tabubia ».


Le second groupe visite le village artistique « Art Center » qui les conduit vers des locaux ouverts dédiés chacun à un art : argile, céramique, métier à tisser, musique, objets en bambou, peinture.

Chaque activité commence par la prière à Ganesh (symbole de sagesse, d'intelligence, d'éducation et de prudence, patron des écoles et des travailleurs du savoir).

Village des arts - Atelier sculpture pour les CaravaniersVillage des arts - Atelier de tissage traditionnel


Village des arts - Travail du bambou, les Caravaniers se lancent dans la fabrication de marque-pages

A la poterie, Monsieur Hanuman Thappa nous accueille. De ses mains émerge justement un Ganesh, le Dieu à tête d'éléphant débonnaire, protecteur et bien apprécié des enfants qui le sculptent souvent. Les gargouilles sur le toit ont été faites par cet homme. Le lieu regorge de sculptures en tous genres, ici la créativité foisonne.

Nous sommes invités à laisser la nôtre s'exprimer... certains Caravaniers travailleront le bambou, d'autres la terre...


Une professeur et Marc transmettent l'importance de la confiance en soi et de sa propre valeurEnsuite, nous nous dirigeons sous l'immense préau où Marc intervient avec une professeur devant les élèves. Un moment intense de vérité où les échanges parlent de confiance en soi, de respect du vivant... Quelques notes de musique répondent en écho à ce qui vient d'être partagé...


Transport du piano jusquà l'amphithéâtreA 12h15, un excellent déjeuner nous attend. Ensuite, nous allons installer le piano à plusieurs... Un moment toujours émouvant montrant la solidarité et l'enthousiasme qui règnent dans cette Caravane...


Les élèves nous ont offert une banderole 'La Caravane Amoureuse' qu'ils ont confectionnéeLe rendez- vous pour le concert de l'après midi est prévu dans l'amphithèatre à ciel ouvert édifié prêt du Banian sacré, plus que centenaire. Richa, notre hôte présente aux nouveaux venus la Caravane amoureuse le programme des réjouissances. Des enfants entonnent un chant indien et nous offrent des dessins, des banderoles colorées où le nom « Caravane amoureuse » est traduit en sanscrit.


Cathy ouvre le concert de l'après-midiCathy débute au piano, suivi de Vassou et deux percussionnistes extraordinaires, Saravana et Sujit qui nous accompagnent depuis Bangalore.


Marc fait découvrir les variacordes aux élèvesDuo improvisé chant traditionnel et piano


Marc joue à son tour au cœur de cet amphithéâtre à ciel ouvert pris dans un écrin de verdure. Bintu, une chanteuse indienne à la voix envoûtante nous emmène...


Danse spontanée sur une mélodie au pianoUn morceau au piano jouée par Olivia avec danse spontanée de Valérie vite rejointe par une indienne, va déclencher les applaudissements des enfants. Pour la première fois, ils découvrent leur professeur dans une danse improvisée pleine de complicité dans les regards et les mouvements.


Danse combat par les musiciens de BaluDes musiciens percussionnistes ont rejoint la Caravane Amoureuse et emflament le public


Puis suit une démonstration percutante d’un art du bâton avant que Dola, Wasoude, Rao, Ajayand et Vaibhou nous jouent des tablas et de l’harmonium. Catherine au violon, Joaquim au tuba, nos Caravaniers musiciens offrent avec générosité leurs talents. Un jeune du Centre Ajay joue de la tabla.


Les gens se déchaînent aux sons des djembésNotre classique farandole est lancée


Nous terminerons tous sur scène riant et dansant tous ensemble avant de se séparer car les enfants doivent prendre le bus pour rentrer chez eux.


Pour le dernier soir avec les musiciens de Balu, concert de djembés sur le toit de lhôtelNous aussi d'ailleurs... Une journée encore bien remplie... d'amour... de partage... de bonheur...et surtout d'espoir pour le futur avec ces jeunes générations éduquées dans une autre conscience... Nous finissons pour certains sur le toit de l'hôtel sous un ciel étoilé et les belles percussions de Sugit qui nous emmènent directement au septième ciel avec en prime les bolas lumineuses de Manon !!! 

Extrait résumé de la conférence de Krishnamurti de 1982

« Pourquoi en tant qu’être humain sur une terre aussi belle, en sommes-nous arrivés là ? La crise est en nous, elle est dans notre conscience. L'ennemi n'est pas à l'extérieur mais à l'intérieur et c'est similaire pour la crise économique. Il est important d'approfondir pour comprendre pourquoi le monde vit tant de misère. Comprendre la nature de notre être, de notre mental, c'est essentiel. Si vous vous sentez responsable, il est temps de percevoir la nature de votre conscience. Observer le mouvement de cette conscience et sa relation avec le monde : est-elle individuelle, séparée, ou est-elle celle de l’humanité toute entière? Depuis l'enfance, nous avons été conditionnés à penser que nous sommes séparés. On divise les noirs et les blancs, les arabes et les juifs, les gros et les maigres....ce n'est qu'un concept, une illusion, .

Pourquoi s'attache t-on à la nationalité ?... Là encore nous divisons. C'est en fait le besoin de sécurité physique et psychologique qui nous pousse à cela et qui nous conduit à des guerres alors que la terre est à tous.

Cela peut nous demander une vie entière pour sortir de ce conditionnement mais c'est vital. C'est très important de douter, de mettre en doute cette pensée. Investiguez ! Questionnez-vous ! Doutez ! Questionnez la réalité de l’individualité !

Votre conscience est-elle la vôtre ou celle de l'humanité ? Cette extraordinaire vitalité est-elle la vôtre ou partagée par toute l’humanité ?

Notre conscience elle-même est fragmentée, en désordre. Nous voulons la paix et nous faisons la guerre. Partout il y a des peurs, l'urgence du désir, le désespoir... Il est nécessaire de faire face à cette contradiction.

Votre conscience peut-elle être séparée de cela ?

Allez en profondeur et découvrez...Votre conscience est la conscience de toute l’humanité. Une personne sérieuse observe... A partir de cette observation, l’action prend place car elle provient alors d’une vision globale de la vie, holistique, entière, sacrée. Maintenant est-ce possible ? … ».

Témoignage

« En Inde, le temps passe réellement différemment.
Si l'on vit à l'indienne, le rythme paraît terriblement lent et serein.
Et avec la Caravane qui nous entraîne, les journées sont finalement bien remplies.
Tant de belles choses passées, déjà...

J’appréhende le retour,
Mais tout n'est que continuité !

Chaque début a une fin, et chaque fin engendre un début.
La nature est une savante composition de vases communicants.
L'énergie circule.
Certains quittent la Caravane, mais d'autres la rejoignent, tout autant gonflés d'amour !

Non, ce voyage n'est pas « hors-temps »,
J'essaye de m'en convaincre.
Il y a un avant, et un après.
Et le pendant, c'est aussi la vie !

Cette vie parisienne surmenée...

Ce voyage c'est un cadeau.
Un cadeau pour la vie.

Enjoy ! »

Joaquim

Sous le banian

« Alors que nous arrivons à l'école Krisnamurti Valley School c'est un sentiment de paix qui se pose immédiatement en moi.

Située proche de Bangalore elle se trouve au milieu d'un immense parc semi tropical verdoyant et aéré.

L'harmonie par l'utilisation des couleurs, partout présentes dans la nature, la recherche d'unité par delà les divisions de ce monde, la reconnaissance des enseignements artistiques posés au même niveau que ceux intellectuels… Tout ici respire la vie dans son expression la plus complète.

C'est dans un état d'accueil à cette beauté qui me touche au plus profond que je m'approche d'un arbre immense… Un banian dans sa majesté, sa force et sa douceur.

Dès cet instant, je ne peux continuer plus loin ma visite car je suis comme doucement enveloppée par son aura bienfaisante.

Ici, encore plus qu'ailleurs dans ce lieu, une douce paix se pose en moi et autour de moi. D'autres Caravaniers, quelques élèves et enseignants se laissent aussi attirer par cet endroit.

Je m'approche du tronc ; plus j'avance plus je ressens la force et la douceur de cet arbre. En moi se diffuse un sentiment d'expansion horizontale semblant toucher jusqu'au plus loin de la planète, touchant l'humanité entière avec une énergie père-mère associée.

A l'intérieur de moi c'est comme s'il me disait "Comme vous, je viens du ciel sur la terre et je m'ancre profondément. Je fais naître des enfants du ciel par mes racines aériennes qui plongent dans la terre à partir de mes branches.

Ma force est autant horizontale que verticale, comme vous les humains.

J'ai un lien fort avec l'humanité, les ancêtres… Qu'il est important de préserver en se reliant à eux, en les respectant.

Est-ce possible de rester en harmonie sur cette terre sans cela ?

Ce message méditatif intérieur m'apaise tout en me reliant à un sentiment d'unité paisible.

Ce midi, le repas se passera sans moi et je me sens pleinement nourrie… D'une autre manière… Une douce et fine joie intérieure est là, se diffuse partout en moi.

Bientôt, juste là, le concert dans l’amphithéâtre à ciel ouvert, caressé par les branches du banian… Et devinez quoi ? L'expression artistique de chacun ce jour-là est d'une telle beauté qu'elle me tire des larmes de gratitude à plus d'un moment.

Notamment lors du jeu dansé improvisé de Valérie, Caravanière, avec l'enseignante de danse de l'école. Leurs bras, leurs regards, tels les branches du banian présent, se cherchent et se touchent avec grâce…

Communion entre l'humain et la nature, communion entre les humains, comme une union sacrée entre tous les règnes.

Merci à l'Inde où le sacré est présent partout, en tout, de me permettre de vivre ce voyage au cœur du sacré en moi et autour de moi.

Merci à la folle aventure de la Caravane de laisser exprimer les élans de vie, de joie, de créativité présents en nous et autour de nous ».

Nelly à Ella Nalli


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