Marc Vella
Nous sommes à Mégrine, et déambulons dans la rue, piano en tête et la cavalerie des caravaniers va de ci delà rencontrant et distribuant « Le chant des libres » de Marc. J’aborde 2 jeunes filles, l’une est étudiante pour devenir journaliste et l’autre avocate. Je salue leur désir de se mettre au service de l’humain et j’entends dans leur réponse beaucoup d’empathie pour les plus défavorisés. Mais le piano est déjà loin devant moi. Il me faut quitter ces charmantes femmes : promesse d’un monde en construction.
Je serre des mains, partage des sourires jusqu’à un homme avec qui la conversation se prolonge, nous évoquons la Paix et toutes les valeurs qui s’inscrivent autour de ce mot. En conclusion, il me dit qu’il a « le cœur blanc ». C’est la première fois que j’entends une telle expression. Je le lui dis et c’est alors qu’il me révèle que depuis 15 ans il assure l’appel de la prière….J’abandonne cet homme et me dirige vers un centre culturel où nous avons rendez-vous. Le piano est là et Cathy joue. La mosquée est juste en face et qui se trouve là ? notre homme au cœur blanc. Je vais vers lui et nous poursuivons notre conversation, il me présente l’homme en charge de l’entretien de la mosquée et une femme, voisine de la mosquée l’interpelle, traverse la rue. Elle me raconte plus de dix années passées en France, en Allemagne et j’attire son attention sur les notes de piano qui s’envolent portant leur message de Paix. Elle me dit leur beauté et je l’invite à aller le dire à Cathy. « Oh non, j’ai honte » me dit-elle. « Mais non, osez, venez je vous accompagne ». Encore quelques minutes pour la décider et pour ce qu’elle a partagé avec Cathy… interrogez la !
Demain, cette femme osera aller au-delà de sa honte, vers tous ses possibles. Quant au cœur blanc de cet homme, je l’imagine dans sa confiance en plus grand que soi et dans sa fidélité… sans faille.
Claude
Hier soir à Bizerte, des adieux émouvants ont eu lieu avec les jeunes qui nous ont accompagnés pendant ces journées Bizertines : embrassades, accolades se sont succédées pour marquer l’événement. Partage, chaleur humaine, remerciements, célébration de la qualité des échanges.
Tous les caravaniers ont adopté ces jeunes qui partagent de manière si naturelle nos valeurs d’échange, d’accueil, de spontanéité et d’acceptation de l’autre. Ils se prennent en main. J’ai cette phrase qui me vient en tête en pensant à eux : « Ils l’ont fait car ils ne savaient pas que c’était impossible ». Que Dieu les aide et les accompagne !
Dans le bus qui nous conduit vers Takrouna et Hammam Sousse, les informations sur le déroulement de la journée sont données. Puis l’ambiance devient studieuse : Les « écrivains » écrivent, les « photographes » montrent et choisissent leurs photos, les « journalistes » publient : La communication positive célébrant la grandeur et la beauté des hommes est en route. Espoir !
A Mégrine, un comité d’accueil officiel nous attend. Une banderole annonçant cette manifestation sous l’égide des Jeunes Positifs et de la Jeune Chambre Internationale est déployée. Elle sera le décor de la photo commémorant la rencontre entre les Mégrinois et les caravaniers et de l’interview pour la télévision.
Après cet accueil officiel, les journalistes et les caravaniers se mettent en route à pied, derrière le piano et font la promotion des valeurs de notre démarche. Les bisous sont envoyés et reçus, y compris par les policiers en tenue. Les Tunisiens sont très à l’aise avec les valeurs portées par la caravane : la Paix, l’accueil de l’autre. C’est peut être un héritage de leur longue histoire de terre de passage et terre d’accueil entre Orient et Occident.
Nous nous rendons ainsi jusqu’au Centre culturel établi dans une ancienne église, juste à côté de la mosquée. La salle est vite équipée pour permettre la projection du film « Le piano joie » et une rencontre-échange sous Skype avec Marc.
Quelques phrases de cette matinée :
« Ne pas chercher à avoir raison – dans la rencontre rester amoureux de l’autre »
« l’Être est beau dans sa spontanéité. Et la spontanéité permet la rencontre car elle accepte la vulnérabilité. »
Après les rencontres de Mégrine, et le déjeuner, nous reprenons la route pour Takrouna, un village tunisien perché sur sa colline.
Ici encore des rencontres de cœur, entre autres avec une famille habitant dans ce village perché typique. Voici les propos de Claire après son long échange avec une femme du village : «Tout est harmonieux ici. Il y a un équilibre entre les personnes et le lieu. Tout rayonne de beauté : le lieu et les personnes et pourtant la vie reste difficile. Le regard de cette femme exprime la densité de la vie, dans une fidélité aux gestes simples du quotidien. Elle vit ici seule avec son fils de 24 ans. ». Ce lieu inspire bien des caravaniers européens comme tunisiens tant il respire la Paix et l’enracinement. Plusieurs me confient, ils auraient bien aimé y rester pour une retraite.
Après, retour dans le bus direction Hammam Sousse. Dans le bus : une surprise. Nous visionnons en direct, le journal télévisé où 1 minute est consacrée au passage de la caravane à Mégrine. Le montage est bien fait : reprise d’extrait du film « le piano joie », montage des interviews, les traductions fidèles aux messages donnés par Monique, Cathy, JCI et PlanetPositive Action. M. Hamadi, l’accordeur de piano, est « rassuré » par le fait que la télévision tunisienne soit « réglo » et passe ce message d’actions concrètes et positives qui rentrent en concurrence avec l’immobilisme des partis politiques en place.
Bernadette
Nous sommes au pied d’un piton rocheux à Takrouna, 200 mètres de grimpette pour dominer la plaine. La montée se fait avec un couple, lui entretient le site, elle, chaque jour parcourt 25 km pour aller fabriquer des blues jeans. Cadence effrénée, peut-être celui que je porte sur moi est passé entre ses mains. Ils ont un enfant et vivent tout là-haut, une des 5 familles qui y résident.
Je fais le tour du belvédère et m’apprête à redescendre pour respecter l’heure, quand une femme vêtue de noir me propose un café, je décline sa proposition pour cause de manque de temps. Elle insiste et ouvre les portes du café exposition dont elle a la charge. Un lieu habité, simple, décoré par Aïda une artiste inspirée par ce lieu dont elle est propriétaire, des bijoux, des peintures, des tableaux composés. Je vais pour partir et remercier Fatma quand le groupe surgit et Isabelle décide de sursoir à la consigne de l’heure. Alors, tout le monde s’assoit, commande café turc, thé à la menthe enrichi de pignons, en un instant, peut-être une journée sans visiteur, se transforme en une belle journée fructueuse…. car il faut bien vivre, n’est-ce-pas ?
Claude
Les malaguenes ont fondé le village au VIIIème siècle et l’ont baptisé Ta Kurunna en hommage à une région montagneuse des environs de Malaga, d'où ils arrivaient.
Nous entamons l’ascension par petits groupes, ponctuée de «aslamas » de ci de là. Arrivés quasiment au sommet, une flûte retentit. Je m’approche et dans une courette, la flûte est un simple tube de cuivre, héritage d’un plombier local.
- Aslama, esmi Françoise. Esmek ?
- Esmi Selim
Selim est tout jeune, son grand regard noir se plante dans le mien et sa voix déjà grave trahit un adolescent.
- Tu travailles ? Tu vas à l’école ?
- Je travaille
- Et que fais-tu Selim ?
- Je suis avec les moutons pour manger
- Aslama Selim
Presque arrivés au bus, un troupeau de moutons rentrait des pâturages.
Françoise
Venant de Bizerte, Tunis, la caravane de la Paix se dirige vers Hamam Sousse et Port El Kantaoui. Nos amis tunisiens nous emmènent à Takrouna non loin d’Enfida. Paysages magnifiques, les oliviers envahissent les champs par milliers. Emergeant au-dessus de la plaine, un village perché se présente à nous. Arrêt de la Caravane au pied du piton rocheux et montée à pied par une voie très raide qui contourne le relief. Le but : rejoindre une maison typique, certain parle d’un marabout. Nous commençons l’ascension lentement mais sûrement. C’est alors que Bassam dépasse une dame vêtue de bleue qui dignement porte un poids volumineux et pesant. Bassam salue la dame qui répond avec un grand sourire malgré les efforts et le fardeau. Soudain, la galanterie occidentale ou la charité chrétienne l’emporte. Bassam propose de porter le fardeau et il s’attend à un refus et à sa grande surprise elle accepte. Bassam s’empare de l’énorme paquet courbé par un poids d’au moins 20 kg. Au début surpris par cette lourdeur il poursuit vaillamment la route en bavardant avec la dame bleue.
- Comment t’appelles-tu ?
- Hamida, elle épelle son nom, surtout ne pas oublier le H.
- Moi c’est Bassam. Vous habitez là-haut ?
- Oui, j’ai ma maison tout en haut sur le rocher. Tous les jours, je fais l’approvisionnement. Quand il y a peu comme aujourd’hui, c’est moi qui monte les provisions. Pour l’eau, j’ai un petit âne, et si c’est lourd et encombrant, je loue un petit camion.
Bassam constate que Hamida qui vit toute seule avec son fils assume les difficultés de la vie mais elle sait ce qu’elle veut et fait face. En arrivant au somment, Bassam dépose le fardeau devant une porte bleue. Hamida s’active, découvre son métier à tisser, expose les tapis déjà fabriqués, fait visiter une pièce où elle présente des bibelots à vendre, nous fait entrer dans sa maison, nous montre sa cuisine et le four à pain (Tabouna =le four, Khobs = le pain Khobs Tabouna= le pain du four traditionnel) Hamida offre à tous les caravaniers son pain, son huile d’olive et des petites olives. Elle explique que sa maison est à côté de la mosquée et du marabout. Elle parle avec un regard lumineux, un sourire franc, ravit d’ouvrir sa maison et son cœur. Elle a tout offert d’elle sans rien demander en échange. Par la suite, elle se prête de bonne grâce à des séances de photos, discutant avec les uns et les autres.
Au final, une belle rencontre imprévue. La dureté de la vie et la beauté des lieux font qu’il n’y a pas avec elle de faux semblants, c’est une rencontre authentique et vraie, étonnante dans un lieu qui est comme une porte du ciel. Malgré les conditions difficiles, elle ne s’imagine pas vivre ailleurs. Elle souhaite que l’on vienne la visiter, que l’on vienne acheter son artisanat de manière à lui permettre de rester avec les autres familles présentes (4 familles berbères et une andalouse) dans leurs incroyables demeures qui côtoient le ciel.
Hamida vous accueillera avec plaisir pour partager un couscous ou passer une nuit, son téléphone : (216)22 24 40 75.
Bassam, Daniel