C’est certain pour moi, tous les arabes ne veulent pas islamiser la Terre entière. Les arabes sont conscient de la valeur de la différence et s’émerveillent de l’incroyable diversité humaine. Les arabes, ils sont comme toi et moi, ils veulent seulement la paix, la joie, l’amour... Attention aux discours arabophobes islamophobes, discours qui crucifient le monde, surtout ne pas les croire et encore moins les colporter.
Sans aucun doute, il y a des muezzins qui hurlent comme des loups affamés appelant la meute sur le monde mais il y a aussi des muezzins qui chantent à faire frémir d’amour les étoiles. J’en ai entendu beaucoup dans mes errances. Lorsque j’ai entendu les seconds mon âme pleurait d’extase.
Nous oublions, nous occidentaux, nos intégristes chrétiens, mordant l’âme des hommes et brulant le monde... il n’y a pas si longtemps, ils ont fait des ravages dont nous gardons encore les stigmates. Aujourd’hui encore, certains de ces extrémistes dressent le poil et grognent en montrant les dents... N’ayons pas peur.
Quoi qu’il se dise, se fasse, se passe, portons sans cesse dans nos coeurs, la résurrection du monde.
Des femmes et des hommes portant cette lumière, il y en a des milliards... Musulman, chrétien, juif, orthodoxe, animiste, chamane, bouddhiste, hindouiste, athée, laïque, tout cela en vérité, c’est la même chose. La seule différence et il y en a une : es-ce un porteur de Ciel ou un porteur d’abîme ?
Pose-toi sans cesse cette question, dans ce que tu vis au quotidien, avec tes amis, tes amours, ton travail, ta famille, et surtout avec toi-même...
« Suis-je un porteur de Ciel ou un porteur d’abîme ? »
Qu’est donc un porteur de Ciel ?
Confiant en toutes circonstances, il lui arrive parfois de trébucher et d’être maladroit comme tout un chacun mais quoi qu’il arrive, il reste bienveillant. Il apprend à s’abandonner jusqu’à étreindre sa propre abîme et la traverser en la magnifiant... Le secret de la résurrection est là. Un porteur de Ciel aime jusqu’aux ténèbres qu’il traverse dans le silence de la joie... Un porteur de Ciel offre le Ciel aux autres, il s’accorde en accordant la Joie.
Ce qui rend malheureux n’est pas de ne ne pas avoir d’amour
Ce qui rend malheureux est de le refuser aux autres.
Un porteur de Ciel ne refuse rien, il dit oui, ose, tente, fais attention mais vas-y ! vis ta vérité du moment. Un porteur de Ciel te rend à toi-même, responsable, libre et vivant enfin.
Marc Vella
Vendredi matin, la Caravane poursuit sa descente vers le Sud et prend la direction de El Jem, célèbre pour son amphithéâtre, le troisième plus grand de l’Empire Romain (environ 30 000 spectateurs) après le Colisée de Rome (45 000 spectateurs) et celui de Capoue. Nous prenons le temps de nous imprégner des lieux, d’imaginer les combats de gladiateurs passés, et de s’accorder… partage de chant du cœur reliant caravaniers et tunisiens au centre de l’arène.
Cathy prolonge cet émouvant moment de grâce par un concert juste devant cet impressionnant édifice, où le trafic est important. Là encore, quel accueil nous recevons par les habitants touchés par cette présence amoureuse ; certains caravaniers distribuent ‘’Le Chant des Libres’’ ou en proposent une lecture, d’autres accompagnent un spectateur vers le piano dont il n’ose approcher, ou dégustent le thé à la menthe qui nous est généreusement offert par le gérant du Café Les Mires situé juste en face. Pour le remercier, nous transportons le piano sur sa terrasse pour une photo et un dernier morceau de piano, avant de reprendre la route en direction de Sfax.
Nous arrivons dans la deuxième ville de Tunisie en début d’après-midi. Premier arrêt au Centre Culturel Français pour un concert dans son jardin verdoyant et calme. Accueil très chaleureux, avec de nombreux jeunes étudiants pleins de questions et d’envie d’échanges avec nous. La plupart ont eu l’information de ce concert il y a seulement 10 minutes, sur la page facebook du Centre culturel… comme quoi les réseaux sociaux sont bien utiles, surtout pour la communication avec les jeunes. Les lycéens prennent le temps de cette rencontre en pleine période de révision. Ils nous précisent qu’en première année de secondaire, les examens sont les plus difficiles, et permettent de choisir la filière : sciences, lettres, économie-gestion ou sciences naturelles.
Cathy invite une jeune fille à nous jouer une mélodie. Après cet air pendant lequel la jeune pianiste tremble comme une feuille, Cathy rappelle qu’il ne s’agit que de la peur du jugement et du manque de confiance en soi, et que pour être en paix avec l’autre, il est incontournable de cultiver la paix en soi par la confiance, l’acceptation de qui l’on est et l’amour. Le message est applaudi et l’on sent que ces jeunes étudiants, comme partout ailleurs, ont besoin de ces graines d’amour que nous sommes venus semer et qu’ils sont prêts à faire pousser.
Pour contraster avec ce cadre paisible et plutôt solennel, nous poursuivons par une déambulation joyeuse au cœur de la ville ; celle-ci nous emmène vers l’hôpital de Sfax et ses services pédiatriques où nous sommes attendus. Encore une visite poignante pendant laquelle chaque caravanier vit une rencontre le renvoyant à la vulnérabilité de l’humain, à l’injustice de voir ces petits êtres souffrants, à la joie que peut diffuser cette courte présence que nous offrons. Certains enfants sont très attentifs mais semblent tellement épuisés qu’ils ne laissent rien paraître ; souvent tout de même, un regard scintille, un sourire s’esquisse et la grâce s’instaure.
Nous repartons émus vers l’hôtel.
Sfax étant une ville traditionnelle d’accueil des Lybiens, 7 000 d’entre eux viennent d’arriver compte-tenu des événements des derniers jours. Nombre d’hôtels affichent complet ; nos coordinateurs tunisiens ont dû insister pour que nous ayons les chambres réservées depuis plusieurs semaines, mais nous sommes heureux de nous regrouper en y rajoutant des matelas pour permettre au maximum de personnes de loger dans cet hôtel où nous passons la nuit. Le restaurant ne nous accueillera pas, et nous irons dans un des fast-food encore ouverts à 20 heures ; le rythme ici est différent du Nord de la Tunisie…on s’y lève tôt pour terminer le travail plus tôt le soir, plus en rythme avec le soleil.
Pendant le dîner, nous avons l’immense surprise de retrouver nos amis tunisiens pour le week-end : Marouen, Sofiane, Mohammed, Aymen.
C’est un lieu fréquenté par les étudiants de Sfax, lieu d’expression artistique aussi. Le piano a été installé sous les palmiers et les eucalyptus. Atmosphère est sereine est tout ce public de jeunes est tranquille. J’aborde 2 étudiants, l’un désire être avocat et l’être sera ingénieur en génie civil. je les interpelle sur leur responsabilité future. L’ingénieur, Youssef, veut construire des tours, connais le ciment armé mais semble ignorer l’existence de la chaux. Le futur avocat Kaïssar, s’interroge beaucoup plus sur le monde et quand je lui recommande de ne jamais oublier les plus petits, il me confirme ce désir, mais ne sait pas s’il saura s’opposer toute sa vie à la force des puissants.
Il me confie sa désespérance devant le comportement des jeunes « qui ne pensent qu’à s’amuser et boire ». Son cœur n’est vraiment pas en Paix et lorsqu’il me demande ce que l’on peut faire je l’invite à écouter la musique de Cathy et se pacifier au plus profond de lui-même. Après il verra ses frères autrement et pourra peut-être être contagieux dans sa sérénité de vie. L’ingénieur nous avait quittés pour la prière. Il est de retour et avant de terminer notre échange je l’invite à aller creuser la métaphore de la construction de la tour de Babel. Puis nous nous rapprochons du piano et je les invite à faire silence et écouter leur cœur.
Cathy laisse la place à Emna, pianiste amateur toute stressée dans son jeu, à la fin de sa prestation Cathy la libère de sa peur de la fausse note et la remercie d’avoir osé venir jouer. Je me rapproche d’elle, la félicite. Elle fait des études de pharmacie et à l’intention de travailler à la fabrication des médicaments. Je l’interroge sur la nature de ceux-ci. Elle ne s’est pas interrogée sur ce sujet. Je lui parle de l’homéopathie, phytothérapie et l’invite à s’engager dans cette voie.
La Paix ne serait-ce pas aussi œuvrer pour le respect de son corps, de sa santé et de celles des autres ?
Nous nous sommes quittés heureux, lui rappelant de, surtout, ne pas oublier de se libérer de la peur des fausses notes !
Claude
Deux journées,
Deux rencontres,
Deux sources d’émerveillement.
Jeudi, Hammam Sousse, SOS Village d’enfants,
Les enfants qui jouent, Cathy au piano, rondes, danses, ballons, bulles de savon, câlins entre enfants et caravaniers, …
Soudain, une petite fille, 3 ans et demi, les yeux remplis de tristesse, vient vers moi,
Elle se réfugie dans mes bras, pour un câlin intense, elle y restera ¾ d’heure. Petite plume légère, je ne sens même pas son poids.
Câlin, abandon total, fusion. Mon cœur de père est touché. Nous vivons tous deux cette intimité éphémère.
Puis je l’écarte de moi, pour la regarder. Un merveilleux cadeau m’attend : ce visage triste a laissé place à deux étoiles, un regard intense, une joie profonde émanent de ce visage, un sourire venu du fond du cœur. A deux reprises encore, nos regard se croiseront, et à chaque fois je recevrai cette lumière, cette flèche en plein cœur, ce regard qui semble me dire « enfin, je te retrouve », comme si nous nous connaissions depuis toujours.
Aucun objectif n’aura pu saisir l’intensité de ce regard, seule la pellicule de mon cœur aura été impressionnée.
L’heure arrive de se séparer, je lui souffle à l’oreille quelques paroles, qu’elle ne peut comprendre mais que son cœur comprend. Séparation en douceur, seules subsistent l’émotion, la joie de ce cadeau inattendu, quelques larmes en témoignent…
Vendredi, Sfax, Hôpital des enfants.
Le piano reste dehors, dans sa remorque. Difficile de le faire rentrer dans les couloirs de l’hôpital.
Bassam me dit, apercevant un groupe de femmes berbères : « viens Antoine, nous allons découvrir le piano et tu vas jouer pour ces femmes ». Ce que je fais.
Puis une fille s’approche, environ 10 ans, elle veut jouer avec moi, je l’accueille, nous jouons ensemble, maladroitement pour moi, peu rompu à cet exercice. Parmi les caravaniers restés dehors, Christine se renseigne sur cette enfant, apprend que sa mère est en soin à l’hôpital, que son père est mort il y a peu, elle décide que sa mère doit la voir jouer et emmène l’enfant à sa recherche.
De retour avec sa mère, la jeune fille revient près de moi et nous recommençons notre partage musical maladroit. Puis l’idée me vient d’aller jouer, sur le clavier, quelques notes dans son « secteur ». A ma surprise, elle se met à répéter mes notes. Un jeu s’installe, elle me répond, à l’identique, ou en variant légèrement. Le rythme s’installe, notre jeu maladroit se transforme en un véritable dialogue, en une communion.
Mélanie, témoin de la scène, me dira avoir vu le visage de cette enfant s’ouvrir, le sourire prendre toute la place. Et l’émotion de sa maman, jeune veuve, touchée au fond du cœur par ce que vit sa fille en cet instant.
Magie d’une rencontre, accueil de l’imprévu, délicatesse partagée…
Antoine